Enfant insécurisé, adulte crédule, société menacée
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Enfant insécurisé, adulte crédule, société menacée
Que nous soyons « mangeurs de vent », aisés à embarquer dans des croyances de tout poil, ou « laboureurs » gardant les pieds sur terre en toutes circonstances, notre caractère dépend de ce qui s’est passé pendant les 1000 premiers jours de notre existence : « avons-nous été sécurisés ou non ? » est la question à se poser, comme l’explique Boris Cyrulnik. La santé de la société, maçonnique ou profane, en dépend.
Dans son dernier livre, Boris Cyrulnik distingue, suite à sa déchirante expérience personnelle d’enfant orphelin juif voué lui aussi à être exécuté, mais également du fait de ses acquis cliniques de psychologue et de neurologue, deux types de personnalité : il y a d’une part le « mangeur de vent », celui qui peut promptement embrasser un récit, par exemple à la faveur d’une indignation, et même si ce récit n’est pas enraciné dans des faits réels à la véracité avérée ; et d’autre part, la personnalité opposée est nommée « laboureur », homme debout les pieds dans la glaise du réel ; il ira forcément lentement, d’autant qu’il a le doute facile, mais il risque bien moins de se perdre.
Tout se joue, dit Cyrulnik, dans les 1000 premiers jours de la vie du petit humain. Dans le cas heureux, une prise en charge de tous ses besoins vitaux, compense sa faiblesse extrême et on obtient un enfant sécurisé.
Après s’être développé avec équilibre entre liberté et sécurité, un tel enfant s’autorise à réfléchir ou à douter avant de choisir . La sécurité dont il est question ici concerne en premier chef son environnement immédiat, avec d’abord sa relation à sa mère, et ensuite le second cercle ( père, fratrie, etc. ).
Dans le cas opposé, l’insécurité psychologique laissera des traces bien difficiles à éliminer par la suite, avec la tentation permanente de d’adopter, pourvu qu’il aille dans le sens de ses envies, tout récit simpliste et dogmatique. Un récit dogmatique et simpliste favorise l’anesthésie des angoisses, au prix de la perte totale ( en fait totalitaire ) des libertés au profit d’un chef, gourou ou dictateur.
Le besoin de se rassurer crée une soif absolue de sentiment d’appartenance, aussi le mangeur de vent privilégiera une allégeance jusque dans le détail, chassant tout doute ; on sait aussi que l’appartenance se construit plus facilement « contre » ceux qui osent émettre la moindre opinion déviante. Devinez quoi : les déviants ou « doutants » deviennent des boucs émissaires.
Étonnant de constater que ces 1000 jours correspondent pile à l’âge symbolique attribué à nos apprentis, non ?
Nos apprentis auront effectivement le choix de leur comportement devant les plus anciens chargés de les instruire. Les petits de 3 ans sortent tout juste du stade anal où ils ont appris leur pouvoir de dire non. Après avoir essayé le non à tout propos, l’enfant de 3 ans doit maintenant apprendre à l’utiliser à bon escient.
Dans nos sociétés post-soixante-huitardes, la tentation est grande, pour l’enfant-roi, d’abuser du non pour prouver sa puissance . Cela peut arriver à l’apprenti bien qu’il ait quitté l’adolescence depuis un bon bout de temps. Les problèmes d’équilibrage de vie entre profession, famille et loisirs peuvent évidemment venir brouiller le tableau…second surveillant, c’est un apostolat ( laïc !).
S’il a manqué de sécurité étant enfant, l’apprenti pourrait conserver un goût marqué pour le conformisme genre « pour vivre heureux, vivons caché ». L’ « apprenti sage » est facile à éveiller à sa propre personnalité puisqu’il est à l’écoute de son atelier.
C’est plus compliqué lorsque l’apprenti se met à suivre un maître lui-même enflammé par une cause un peu dogmatique ou nécessitant une dose certaine de croyances. L’ancien, ainsi mué en gourou débutant, peut sentir son égo flatté d’être suivi par un fringant ( ou une sémillante !) jeune plein(e) de fougue militante, et y prendre goût . Il conviendra alors d’éviter la création de clans idéologiques avec « conflit des vérités », menaces directes sur la qualité de l’égrégore.
Au final, ne surestimons pas le danger qui guette nos mangeurs de vent dans nos ateliers : notre méthode maçonnique nous arme pour y faire face ( vilain mot ! Disons plutôt « nous dote des bons outils » ) .
Le danger est par contre bien réel dans notre société contemporaine. Il suffit de voir comment les réseaux sociaux ont créé des bulles cognitives dans lesquelles un tribun charismatique ( je ne citerai pas de noms mais n’en pense pas moins ) entraîne un tas de mangeurs de vent crédules à s’exprimer toujours plus violemment, sur fond de victimisation propice à fournir les bonnes excuses à la haine. Tout cela prépare le passage à l’acte sur les boucs émissaires, progressivement noircis par bombardement de fake news.
Les trois premières années d’un enfant restent capitales à fignoler , et ce n’est pas sur les réseaux sociaux que vous apprendrez comment faire.
Dans son dernier livre, Boris Cyrulnik distingue, suite à sa déchirante expérience personnelle d’enfant orphelin juif voué lui aussi à être exécuté, mais également du fait de ses acquis cliniques de psychologue et de neurologue, deux types de personnalité : il y a d’une part le « mangeur de vent », celui qui peut promptement embrasser un récit, par exemple à la faveur d’une indignation, et même si ce récit n’est pas enraciné dans des faits réels à la véracité avérée ; et d’autre part, la personnalité opposée est nommée « laboureur », homme debout les pieds dans la glaise du réel ; il ira forcément lentement, d’autant qu’il a le doute facile, mais il risque bien moins de se perdre.
Tout se joue, dit Cyrulnik, dans les 1000 premiers jours de la vie du petit humain. Dans le cas heureux, une prise en charge de tous ses besoins vitaux, compense sa faiblesse extrême et on obtient un enfant sécurisé.
Après s’être développé avec équilibre entre liberté et sécurité, un tel enfant s’autorise à réfléchir ou à douter avant de choisir . La sécurité dont il est question ici concerne en premier chef son environnement immédiat, avec d’abord sa relation à sa mère, et ensuite le second cercle ( père, fratrie, etc. ).
Dans le cas opposé, l’insécurité psychologique laissera des traces bien difficiles à éliminer par la suite, avec la tentation permanente de d’adopter, pourvu qu’il aille dans le sens de ses envies, tout récit simpliste et dogmatique. Un récit dogmatique et simpliste favorise l’anesthésie des angoisses, au prix de la perte totale ( en fait totalitaire ) des libertés au profit d’un chef, gourou ou dictateur.
Le besoin de se rassurer crée une soif absolue de sentiment d’appartenance, aussi le mangeur de vent privilégiera une allégeance jusque dans le détail, chassant tout doute ; on sait aussi que l’appartenance se construit plus facilement « contre » ceux qui osent émettre la moindre opinion déviante. Devinez quoi : les déviants ou « doutants » deviennent des boucs émissaires.
Étonnant de constater que ces 1000 jours correspondent pile à l’âge symbolique attribué à nos apprentis, non ?
Nos apprentis auront effectivement le choix de leur comportement devant les plus anciens chargés de les instruire. Les petits de 3 ans sortent tout juste du stade anal où ils ont appris leur pouvoir de dire non. Après avoir essayé le non à tout propos, l’enfant de 3 ans doit maintenant apprendre à l’utiliser à bon escient.
Dans nos sociétés post-soixante-huitardes, la tentation est grande, pour l’enfant-roi, d’abuser du non pour prouver sa puissance . Cela peut arriver à l’apprenti bien qu’il ait quitté l’adolescence depuis un bon bout de temps. Les problèmes d’équilibrage de vie entre profession, famille et loisirs peuvent évidemment venir brouiller le tableau…second surveillant, c’est un apostolat ( laïc !).
S’il a manqué de sécurité étant enfant, l’apprenti pourrait conserver un goût marqué pour le conformisme genre « pour vivre heureux, vivons caché ». L’ « apprenti sage » est facile à éveiller à sa propre personnalité puisqu’il est à l’écoute de son atelier.
C’est plus compliqué lorsque l’apprenti se met à suivre un maître lui-même enflammé par une cause un peu dogmatique ou nécessitant une dose certaine de croyances. L’ancien, ainsi mué en gourou débutant, peut sentir son égo flatté d’être suivi par un fringant ( ou une sémillante !) jeune plein(e) de fougue militante, et y prendre goût . Il conviendra alors d’éviter la création de clans idéologiques avec « conflit des vérités », menaces directes sur la qualité de l’égrégore.
Au final, ne surestimons pas le danger qui guette nos mangeurs de vent dans nos ateliers : notre méthode maçonnique nous arme pour y faire face ( vilain mot ! Disons plutôt « nous dote des bons outils » ) .
Le danger est par contre bien réel dans notre société contemporaine. Il suffit de voir comment les réseaux sociaux ont créé des bulles cognitives dans lesquelles un tribun charismatique ( je ne citerai pas de noms mais n’en pense pas moins ) entraîne un tas de mangeurs de vent crédules à s’exprimer toujours plus violemment, sur fond de victimisation propice à fournir les bonnes excuses à la haine. Tout cela prépare le passage à l’acte sur les boucs émissaires, progressivement noircis par bombardement de fake news.
Les trois premières années d’un enfant restent capitales à fignoler , et ce n’est pas sur les réseaux sociaux que vous apprendrez comment faire.
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