L'univers des archétypes

En ce moment je m'intéresse tout particulièrement aux travaux de Karl Gustav Jung (1875-1961), je pense que c'est quelque chose d'absolument essentiel en psychologie. Car cela a permis de relier l'individuel au collectif, en présentant l'ensemble des pensées comme pouvant être "reliées" d'une manière inconsciente ! Passionnant...

passionnant en effet.
tu lis quel livre de CG Yung?

"L'homme à la recherche de son âme"; excellent !
"Métamorphose de l'âme et ses symboles"; tout aussi excellent !

Ce que j'aime en Jung, c'est le fait qu'il ait associé l'imaginaire à la psychologie, mais pas d'une manière rigide et sèche, plutôt d'une manière évocatrice et pleine de sens, tout en gardant l'ouverture propre au penseur, au rêveur... Une psychanalyste comme Marie-Louise Von Frantz fut une très grande "fille spirituelle" de Jung; à lire son excellent ouvrage :" L'interprétation des contes de fées", que j'ai trouvé bien meilleur que celui de Bruno Bethelheim...

oh, en effet super interessant.
Faudrait que je ressorte mes bouquins, car j'avoue que je mélange un peu tous les titres ....

Avez vous lu l'homme et ses symboles, il a aussi écrit un livre sur le yi king, différentes orthographes, qui m'a beaucoup servi en Chine. Pour Olive, j'ai rencontré Brigitte Manivelle qui anime Psychause et B Cyrulnik sur une croisière sur la Volga. Elle m'a dit : il n'y a pas de hasard et depuis nous restons en contact, grâce à Jung?...

Oui, de plus Boris Cyrulnik est quelqu'un que j'apprécie beaucoup, même si je ne le connais pas personnellement, mais il exhale une empathie qui est palpable.
Le grand apport de Jung (même si bien sûr ce n'est qu'une psychologie théorique, néanmoins très intéressante) c'est le fait qu'il ait aussi mis l'accent sur l'importance des liens intrapsychiques, des symboles comme représentations possibles des affects. Par exemple lorsqu'il expose la vision qu'ont les hommes vis-à-vis d'objets comme la lune ou un arbre, il crée un sens qui est admissible à la psychologie. Bien sûr ce sens n'est pas le même en fonction des cultures et des individus, mais il peut fédérer un grand nombre de pensées en élaborant un inconscient collectif. De plus il pouvait s'appuyer sur la culture des siècles passés, donnant des formes et des "auras" aux choses. Je trouve que c'est un domaine passionnant, car il met en relation l'homme (sa psyché) et la nature, sous des apparences variées et propres à être interprétées, et parfois à fournir des explications sur telle ou telle pathologie.

Tout cela est aussi fonction de l'époque, les perceptions et les symboles peuvent évoluer... Mais le substrat est fertile.

À un moment je me suis complètement plongée dans les théories de Jung mais j'ai eu peur de me laisser emporter dans l'imaginaire et de décrocher de la réalité . C'est trop tentant parfois de partir dans des associations on ne sait où cela peut aboutir ,il faut un rempart. Un psy compétent peut être ?

Je connais cela, étant moi même plutôt rêveur de nature et porté sur le monde onirique et poétique, j'ai du me reconstruire un esprit plus "analytique", mais tout aussi rêveur ! Ceci dit ce n'est pas nouveau, car j'ai toujours été ainsi, un mélange de science et de poésie, d'imaginaire...

L'imaginaire est le côté de nous mêmes qui nous parle ainsi qu'un langage, et ce langage se comprend et s'interprète comme un langage oral. En tous cas c'est ce dont Jung était convaincu. Ce langage s'articule autour de symboles, eux mêmes acquis au fur et à mesure de l'histoire de l'humanité et de l'histoire individuelle. L'un des meilleurs exemples c'est la lune; elle est l'objet commun par excellence, et elle alimente tout un imaginaire inconscient qui fait sens sur le plan collectif et individuel; sans compter ses nombreuses implications dans les récits écrits et oraux. Elle peut se définir selon la culture, mais il existe beaucoup de points communs entre les différentes approches.

Nous communiquons aussi par l'imaginaire collectif, certes c'est une communication plus subtile, moins évidente, mais bien réelle.

On associe souvent la femme à la Lune, dans une relation spirituelle, presque physique. Il est connu que le cycle menstruel est plus ou moins synchronisé avec le cycle lunaire, coïncidence ou réelle intrication ? En tous cas c'est quelque chose de troublant, et d'esthétique !

La Lune est considérée comme un principe féminin, et ce dans de nombreuses cultures. C'est probablement l'archétype le plus représentatif d'une forme de mystère élégant, de grâce mystérieuse. Là je m'adresse particulièrement à toutes nos amies du forum : mesdames, quelles sont vos impressions à ce sujet ? Quels sont vos ressentis à vis-à-vis de la sélène influence ? Nous sommes curieux de le savoir...

Merci de bien vouloir nous faire partager vos idées à ce sujet.

Du moment que ce ne sont pas des dogmes le rêve est toujours enrichissant. Par moment je sens que les psy sont dogmatiques. S'ils étaient tous comme Olive Ça serait chouette.
Pour ma part la lune ne me parle pas.
Dans mon enfance j'étais fascinée par les étoiles et le ciel...
Mais la lune m'est toujours restée étrangère.
Quant aux cycles menstruels c'est la pire des tortures pour certaines. Pas besoin de noter sur un agenda. Évanouissement et douleurs atroces 2 jours avant !
Je ne sais pas si la lune y est pour quelque chose mais j'en doute... Peut être quelqu'un a des infos sur le sujet ?

Tout d'abord merci pour le compliment Marie !
Effectivement, je n'ai jamais été dogmatique...

Mais les psys ne sont pas aussi dogmatiques que cela tu sais, bien au contraire !
En tous cas ce n'était pas le cas Jung, qui a su ouvrir la psychologie vers des champs culturels intéressants, comme les us et coutumes des peuplades ancestrales par exemple, entre autres...

La Lune joue de multiples rôles dans le monde vivant, et sur le plan symbolique elle s'inscrit dans notre inconscient collectif comme un objet à part. Nous avons évolué à ses côtés, il est tout à fait normal qu'elle fasse partie intégrante de notre psyché. Il existe de nombreuses espèces qui sont "soumises" aux rythmes lunaires, et je pense que nous aussi, dans une moindre mesure ou pas. Il n'est pas exclu que la femme ait évolué (biologiquement comme psychiquement) en parallèle avec les rythmes précis des phases sélènes, comme d'autres êtres vivants.

La Lune, objet des peurs et des fantasmes, des rêves. Elle appartient au monde de la nuit, même si elle peut être visible en plein jour. Son statut archétypique est imprimé dans nos inconscients comme une évidence symbolique, et nous nous y référons très souvent, et ce quel que soit le domaine. Un exemple fréquent et commun : celui de l'influence de la pleine Lune, qui fait douter jusqu'aux scientifiques les plus rationalistes ! En tous cas elle ne peut laisser indifférent, il existe un lien très étroit entre notre pensée et l'astre des nuits, peut être est-elle aussi l'objet qui canalise nos peurs du vide, ou du moins qui remplissait ce rôle à une époque où l'on ne connaissait pas les planètes ?

Mon expérience avec les psy n'a pas été bonne.
Pourtant la première que j'ai connu était remarquable. Mais dans un autre continent où les méthodes étaient moins dogmatiques et très humanistes.
Je n'y connais rien et je ne veux pas juger mais pour moi, à Paris ça a été que des cata bien que j'ai fait des efforts pour les comprendre.

Je ne sais pas si c'est un problème français.
Les psys ne travaillent pas tous avec les mêmes méthodes Marie, et ils n'ont pas forcément suivi les mêmes courants d'idées, les mêmes formations. Et puis, il ne faut pas croire qu'il suffit de contacter n'importe quel psy pour être satisfait, c'est souvent plus compliqué. L'écoute et l'empathie sont indispensables pour faire un bon psy, la théorie ne suffit pas, il faut l'adapter en fonction de la personnalité du patient, et non l'inverse ! C'est évident mais beaucoup de psys dénoncent le manque d'empathie de certains leurs collègues, qui restent crispés sur leur bonnes vieilles théories, ce qui est dommage...

Pour revenir à la lune, disons que l'influence est manifeste si l'on se focalise sur elle ! Dans ce cas elle devient un objet de joie, d'angoisse ou de doute, c'était un peu l'approche qu'avaient les anciens. Un grand psychiatre et psychanalyste, Tobie Nathan, a axé toutes ses recherches sur la psychologie des peuples du monde, et il a mis en évidence ces différentes approches culturelles, ce qui est passionnant. Du coup, on ne peut plus parler de psychologie humaine mais de psychologie adaptative, c'est à dire qui est fonction de la culture et de l'environnement. Il est évident que la psychologie d'un indien d'Amazonie n'est pas identique à la notre, du moins pas en totalité. Sans compter l'influence des religions et des mythes, encore très présents dans nombre de cultures.

C'est vrai que mon rêve c'est d'être un psy humaniste, qui sache écouter, comprendre, se fondre dans les demandes de l'être d'où qu'ils viennent. Certains psys y parviennent, et plus qu'on ne croit ; Jacques Salomé est l'un de ces psys, un peu dissident et doté d'un grand charisme.

Rares les psy comme toi.
Concernant la lune, dans une grande ville comme Paris je pense que c'est impossible d'imaginer qu'elle existe. A moins d'avoir une baie vitrée.
Par contre le soleil !! Il fait partie de toute les conversations.
Et nous rêvons toutes de voir à nouveau notre peau se lisser sous ses caresses

L'étude des mondes primitifs ou simplement des civilisations archaïques je ne sais quel mot pourrait employer un homme comme Lévy Strauss, mais ces études donc doivent être passionnantes.
Et source d'inspiration pour le traitement de tes futurs patients.

Oui, car nous sommes tout autant le fruit d'une société, d'une culture, que d'une construction psychique. Ce qui est intéressant aussi c'est la place symbolique qu'occupent les astres dans notre inconscient collectif, en ce sens je trouve les travaux de Jung (et de Marie-Louise Von Frantz*) absolument passionnants, car il a révélé le lien étroit qui nous reliait à une nature architecte. Cette même nature que nous découvrons en grandissant, et qui, nécessairement, affecte notre perception du monde et de nous même. Ce qui est "éthéré" et ce qui "tellurique", sont bien distincts dans le monde archétypique, et dans notre représentation du monde, nous les distinguons sans toutefois les dissocier totalement. La lune était l'objet du monde éthéré, tout en étant elle même tellurique ; statut confirmée par la science au XX ème siècle.

*: Psychanalyste célèbre pour avoir repris les travaux de Jung sur les archétypes, mais aussi pour avoir entrepris des recherches sur l'interprétation des contes de fées.